La compagnie TAP, un enjeu pour Air France-KLM, Lufthansa et IAG
Ben Smith, PDG d’Air France-KLM, a confirmé l’intérêt du groupe pour une prise de participation minoritaire dans TAP Air Portugal, à condition d’obtenir un contrôle réel sur la gestion commerciale de la compagnie. L’objectif est de garantir des synergies opérationnelles et une intégration stratégique, à l’image des participations de Delta dans Virgin ou Aeroméxico.
Air France-KLM, déjà présent au Maroc et en Floride via ses activités de maintenance, envisage aussi d’investir au Portugal dans une unité MRO et dans le développement du carburant durable (SAF). Ben Smith a par ailleurs souligné les atouts de TAP, notamment son réseau vers le Brésil, tout en estimant que son avenir passait par une intégration dans un grand groupe européen.
Enfin, il a jugé politiquement et réglementairement difficile une vente de TAP à IAG (Iberia – British Airways), et a promis de préserver la marque et les emplois portugais en cas de succès de l’offre d’Air France-KLM.
L'analyse de l'APNA:
Le dossier TAP s’inscrit dans une dynamique de consolidation européenne du transport aérien dominée par trois grands ensembles : Lufthansa Group, IAG et Air France-KLM. Chacun cherche à renforcer son réseau global et ses synergies long-courrier pour proposer un service mondial intégré et sans couture — modèle économique des compagnies dites majors.
Face à elles, les low-cost (Ryanair, easyJet, Wizz Air) poursuivent leur expansion selon une logique de point à point, parfois assortie de timides tentatives de coordination avec des transporteurs long-courriers, sans véritable intégration commerciale ni intermodalité fluide.
Dans ce contexte, l’intérêt d’Air France-KLM pour TAP est double :
Stratégique, car il consolide le maillage atlantique et renforce le lien Europe–Amérique du Sud, zone historiquement dominée par Iberia ;
Politique, car il positionne le groupe franco-néerlandais comme alternative crédible à l’influence ibérique d’IAG, tout en garantissant au Portugal la préservation d’une identité nationale.
Le modèle intégré qu’incarne Air France-KLM, combinant majors, low-cost (Transavia) et filiales de maintenance (AFI-KLM E&M), s’oppose ainsi au modèle éclaté du transport européen low-cost, dépendant de la flexibilité tarifaire plus que de la cohérence de réseau.
Au-delà du cas TAP, c’est la construction d’un ciel européen cohérent qui est en jeu : un marché où quelques grands groupes structurent un transport aérien durable, interconnecté, capable de rivaliser avec les géants américains et asiatiques.
La consolidation n’est plus un choix stratégique, mais une condition de survie du transport aérien européen face à la fragmentation réglementaire et à la pression environnementale croissante.