Air Europa, le cheval de Troie de Turkish en Europe

Après l’abandon d’Air France-KLM, Lufthansa et IAG, Air Europa a trouvé un repreneur : Turkish Airlines. Un accord a été signé pour la cession de 26 % du capital pour 275 millions d’euros, une somme d’abord versée sous forme de prêt en attendant le feu vert des autorités espagnoles et européennes. Cette valorisation place Air Europa à plus d’un milliard d’euros, soit le double de l’offre d’Air France-KLM (300 millions pour 51 %).

En dépit de la contrainte réglementaire qui limite à 49 % la participation d’une compagnie extra-européenne, Turkish Airlines prend ainsi pied au cœur du marché européen, avec l’ambition claire de capter les flux vers l’Amérique latine, où Madrid-Barajas constitue une plateforme stratégique. La famille Hidalgo conserve la majorité, mais l’orientation stratégique risque désormais de se décider depuis Istanbul. L’opération soulève des interrogations : feu vert ou veto des autorités, avenir de la participation de 20 % encore détenue par IAG, et conséquences pour la consolidation du secteur, notamment avec la relance de la privatisation de TAP Portugal.

L'analyse de l'APNA:

L’épisode Air Europa illustre l’abandon stratégique des majors européennes face à la survalorisation imposée par les actionnaires espagnols. Là où Air France-KLM, Lufthansa et IAG ont refusé de surpayer, Turkish Airlines a accepté de payer deux fois la valeur estimée, mus par une logique géopolitique plus que financière.

Ce rachat, même minoritaire, doit être vu pour ce qu’il est : un cheval de Troie. Derrière Turkish, c’est l’État turc qui agit, avec la cohérence d’un pouvoir centralisé, utilisant son pavillon national comme unbras de levier de politique extérieure. L’opération offre à Ankara un accès stratégique aux droits de trafic transatlantiques sud-américains et vient compléter la montée en puissance d’Istanbul, hub en devenir le plus puissant d’Europe en termes de capacité.

Face à cette offensive, l’Europe donne l’image d’un continent fragmenté, incapable de défendre ses propres intérêts stratégiques. Quand nos majors renoncent pour des raisons financières, Turkish investit avec la force d’un État derrière elle. La question n’est plus seulement économique : elle touche à la souveraineté du ciel européen.

Source : https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/turkish-airlines-met-la-main-sur-lespagnole-air-europa-2181959

Précédent
Précédent

L’évolution du prix du kérozène est un facteur majeur de l’équilibre économique des compagnies aériennes

Suivant
Suivant

Le trafic aérien français décroche face aux voisins européens aux faibles taxes